Neuvième et dernière chronique de notre voyage au Japon. Elles se suivent toutes chronologiquement selon notre itinéraire. À vous de les lire dans l’ordre qui vous plaît. Bonne lecture!
Pour clore ce voyage en toute beauté, j’ai décidé d’aller suer ma vie (dans le sens qu’il faisait chaud en svp) sur une ferme dans la préfecture de Chiba, 3 jours avant notre retour au bercail. Nous avons donc joyeusement pratiqué l’art du Wwoofing, ce qui se définit comme étant l’échange d’un toit et de nourriture contre un solide coup de main dans les tâches de la ferme.
Je peux aujourd’hui assurer que la besogne d’un cultivateur n’est pas une affaire de détente et d’eau fraîche. Oh que non ! L’homme qui cultive est un homme dont le corps travaille sans répit presque 12 h durant et dont les méninges doivent estimer les récoltes à venir, analyser les menaces de ce qui est déjà en terre, orchestrer les récoltes, user de diplomatie pour vendre au meilleur prix, et ça continue…
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Donc nous voilà à la gare de train de Chiba, à attendre Hiroyuki, un Japonais ayant étudié l’art de l’agriculture en France. Il arrive dans sa camionnette blanche, tsé le genre de blanc parsemé de rousseurs, ce blanc qui traduit le labeur des champs qui se répète jour après jour… Donc Hiroyuki sort de son véhicule, une serviette nouée sur la tête, et bardasse des caisses, empile des boîtes, tasse des outils… tout heureux qu’il est de nous inviter à nous asseoir sur les banquettes fatiguées et poussiéreuses de sa vieille camionnette.
Ci-bas: Jérémy attends côté passager… conduite à gauche on se souvient!! Nous attendons Hiroyuki quelques minutes.

Il nous conduit ensuite à « notre maison » en passant par des petits chemins de campagne, ce qui me permet d’apprécier enfin la nature et de me perdre dans le vide d’un ciel sans édifice.
« Notre maison » est en fait l’ancienne demeure de la famille de notre hôte. Cette charmante habitation, rustique à souhait, est un tantinet laissée pour compte au beau milieu d’un tapon d’arbres très feuillus et peuplés d’araignées gigantesques, très habillent dans le tissage de toile là-où-ta-face-risque-de-passer. Pour compléter le portrait, des objets de toute sorte, clairement devenus inutiles ou simplement abandonnés, entourent ladite demeure, donnant une touche de mystère à notre panorama.

Malgré le risque de contact avec la bête (araignée de tout genre), nous avons eu une chance incroyable d’avoir un espace à nous tout seul pour nous reposer entre nos moments de labeurs.
Fait cocasse
Hiroyuki nous dépose et nous explique les quelques règles de la maison. Durant notre tour guidé de nos quartiers, je spot assez vite l’énorme araignée ayant élu domicile dans l’évier de la cuisine… elle est grosse comme ma paume de main (j’ai de grandes mains). Le dude a dû voir dans ma face que mon cœur avait cessé de battre spontanément !! Maaannnn !!! Je lui demande alors d’une voix calme et posée, à peine audible, si cette chose est vivante. Et lui, sans stress aucun, avec une douceur presque maternelle, il prend la bête avec un ti chiffon, sans l’écraser, ouvre la fenêtre qui est au-dessus de l’évier et la dépose dehors… Oufff… cette image… me donne encore des frissons…
Mais ce n’est pas ça le fait cocasse !!! C’est que l’ado lui, se tenant derrière moi pendant ce court moment de sauvetage, ben il a bien évidemment switché en mode panique (ceux qui connaissent le spécimen savent qu’il est assez parano des « bebites » !!!). C’est avec la pupille dilatée, le souffle court et la face étampée de stress que Jérémy a fait le tour des pièces en demandant au monsieur de tuer tout ce qui semblait suspect et vivant… Nous avons donc assisté à d’autres sauvetages entomologiques.
Bref, le monsieur nous laisse apprivoiser les lieux et nous avise qu’il reviendra nous chercher pour le souper. Je le remercie et m’affaire à prendre mes aises. Et donc lorsqu’il revient, je m’empresse de sortir pour ne pas le faire attendre, mais l’ado ne suit pas… quelques secondes passent… je suis dans la voiture et j’attends avec Hiroyuki… quand soudain j’aperçois une silhouette en mode ninja se faufiler vers la voiture en essayant d’esquiver des toiles d’araignées imaginaires ! La face du monsieur remarquant en même temps que moi les simagrées de l’ado… ça valait vraiment quelques yens !! Car, il faut souligner que le monsieur ne connaît pas du tout le personnage, tsé!!
Première journée de labeur
Douillette introduction aux plaisirs de la ferme agricole… nous semons des graines, bien installés sur des caisses, papotant de politique et d’histoire japonaise. Mon champ visuel se résume à un enchevêtrement d’outils de cultivateurs, de sac de terre, de récoltes qui sèchent, de rack à semis… tout semble à l’abandon, mais je comprends vite que tout est « rangé ».

Ce cultivateur japonais me rappelle sincèrement mon grand-papa, cultivateur lui-même… Dady, dans son garage bordélique, heureux de vaquer à ses tâches, toujours habillé de vêtements usés par l’ouvrage, se déplaçant avec sa vielle Cadillac, véritable char-atelier, en écoutant la Bolduc turluter ses ritournelles. Cette première journée de wwoofing en fut une douce en découvertes et apprentissages, constamment balayée par des effluves réconfortants de souvenirs heureux de mon enfance.


Les repas
Moments privilégiés dans une famille japonaise ! La femme de Hiroyuki, une femme incroyable, gentille et tellement intéressée… interprète italien-japonais de formation, elle a vécu 6 mois en Italie et comprends bien la réalité de « l’étranger ». Elle travaille maintenant avec son mari sur la ferme. Ils ont un petit garçon de 4 ans, le plus mignon des petits Japonais que j’ai rencontré ! Nous avons eu également la chance extraordinaire d’être invité à prendre un repas chez le voisin de la famille Hiroyuki. Un vieil homme de 80 ans passé, toujours actif sur ses terres, habitant dans une maison japonaise traditionnelle avec son gros chien qui ressemble à un ours. Cette soirée se termine sur une note de reconnaissance bien affirmée.

Deuxième journée de labeur
Aujourd’hui, une journée moins relax nous attend. Notre tâche est de plier d’énormes bâches de plastiques pour former des ballots compacts, tout ça sous un soleil très pesant, au beau milieu d’un champ. Il faut comprendre que ces bâches sont pleines de terre et de fumier, truffées d’insectes et suintantes d’un ti jus visqueux, résultat d’une probable condensation, car laissées entassées des jours durant. Mettons que nous avons les bras bruns jusqu’aux coudes en un rien de temps !


Fait cocasse
Je porte un vieux pantalon en tissus noir très léger pour travailler. Dans mon petit sac contenant le l’eau, j’ai apporté de quoi me changer de vêtement au cas où nous ne retournions pas à « notre maison » avant le repas. Mieux vaut être prêt à tout. Donc nous voilà en « p’tit bonhomme » à tirer sur la bâche et à la plier, se beurrant le corps ben comme il faut au passage. La sueur nous coule dans les yeux, comme partout ailleurs sur ledit body d’ailleurs !
Nous sommes donc rendus à notre 5 ou 6e ballot de bâche quand soudain, en me positionnant posture grenouille, pour être efficace dans mon pliage tsé, un craquement très franc retentit suivi d’un agréable vent de fraîcheur au niveau de l’entrejambe. Je me relève d’un coup, drette comme une barre, la face incrédule et les mains cherchant à comprendre ce qui se passe de mon arrière-train. Eh oui, mon pantalon de tissus léger a décidé de rendre l’âme à ce moment précis où je me trouve au milieu de nulle part, les mains pleines de bouette de fumier…
Ça faque… je déambule jusqu’à mon sac en cachant mes fesses dénudées du mieux que je peux. Le mieux que je peux faire est de faire pendouiller ma robe noire en la rentrant comme il faut dans ce qui me reste de pantalon, ce qui donne l’impression que j’ai noué une veste autour de ma taille. Ce joli accoutrement de survie tomba à quelques reprises durant le reste de la journée, exposant de façon fortuite mon postérieur à qui avait le regard chanceux durant les quelques secondes que dura ces échappées ! Fin du fait cocasse à Chiba.
C’est ainsi que notre merveilleuse aventure nippone se termine, un incroyable voyage-test pour notre tour de l’Eurasie débutant juillet 2019. Des souvenirs plein le cœur, des images plein la tête, inestimables moments uniques, que dire de plus sauf merci la vie de me donner la force et le courage d’oser réaliser mes rêves les plus fous !
Merci infiniment à toutes et à tous de nous avoir suivis. Ce fut un sincère plaisir de partager notre périple avec vous !
Et maintenant que vous avez une extrême envie et un soudain besoin de partir au Japon, pourquoi ne pas consulter cette page bourrée d’infos précieuses pour justement faciliter votre départ !?
N.B. Notez que toutes les photos de ce blogue sont miennes et ne sont pas libres de droits.